Bonjour,
Je développe un projet en lien avec des professionnels de la santé libéraux (masseurs-kinésithérapeutes, ostéopathes, pédicures-podologues...).
Ce projet consiste à proposer un accompagnement en ligne à visée préventive et éducative (hors soins), destiné à des particuliers, autour de la santé, du bien-être et de la prévention des troubles musculosquelettiques.
Ces praticiens peuvent contribuer à du contenu, recommander le programme à leurs patients, et percevoir une commission sur les ventes générées par leurs recommandations, via une convention d’apport d’affaires distincte de leur activité de soins.
L’activité est clairement hors soins (aucun diagnostic, acte ou prescription).
Je souhaite m’assurer que ce modèle de rétrocession de commission est juridiquement possible et conforme au Code de la santé publique.
Merci pour vos réponses.
Bonjour,
Voici quelques éléménets de réponse à propos de votre projet.
1. Analyse des faits et des enjeux
Vous souhaitez que des professionnels de santé libéraux (masseurs-kinésithérapeutes, ostéopathes, pédicures-podologues…) participent à l’élaboration et à la recommandation de contenus de prévention et de bien-être en ligne, à destination de particuliers, en dehors de toute activité de soin (aucun diagnostic, acte ou prescription), et perçoivent une commission via une convention d’apport d’affaires pour les ventes générées par leurs recommandations.
L’enjeu principal est de vous assurer que ce modèle (convention hors soins prévoyant commission au professionnel pour une recommandation) est juridiquement sécurisé et conforme à la réglementation applicable, notamment aux interdictions spécifiques du Code de la santé publique.
2. Identification des problématiques juridiques
Régime de la commission ou rétrocession hors soins pour les professionnels de santé réglementés.
Interdiction de faveur, commission ou partage d’honoraires lié aux actes de soins.
Distinction nette entre l’activité réglementée de soins et celle de prévention, information ou bien-être.
Champ d’application des restrictions déontologiques propres à chaque profession.
3. Règle de droit applicable
L’article R.4321-72 du Code de la santé publique pour les masseurs-kinésithérapeutes, et des textes équivalents pour d’autres professions de santé, interdisent strictement toute commission, ristourne ou avantage en lien avec des actes de soins :
« Il est interdit au masseur-kinésithérapeute de verser ou de recevoir une commission à l’occasion des actes professionnels... ».
Cette interdiction vise à protéger l’indépendance professionnelle et l’intérêt du patient.
Cependant, cette interdiction s’applique uniquement aux actes professionnels relevant du champ de la santé réglementée (soins, diagnostics, prescriptions).
Aux yeux du droit, il y a tolérance sous réserve que l’activité soit clairement distincte des soins :
« Si l’activité concernée n’a strictement aucun lien avec un acte de soin […] la réglementation sur la rétrocession n’est pas applicable au sens strict ».
La jurisprudence et la doctrine distinguent l’activité commerciale accessoire (hors champ des soins) des actes soumis au monopole légal des professions de santé. Une activité d’apport d’affaires (recommandation, non soin) n’entre pas dans le champ d’interdiction, à condition :
De ne pas créer d’amalgame dans la communication entre cette activité et la pratique soignante,
De ne pas faire bénéficier les particuliers de ces recommandations dans le cadre ou au détour d’une consultation de soins,
De formaliser par une convention commerciale indépendante, évitant tout lien avec l’acte de santé.
4. Analyse critique des solutions envisageables
Avantages du modèle proposé :
Séparation stricte entre soins réglementés et activité de recommandation préventive/éducative.
Possibilité de rédaction d’une convention d’apport d’affaires conforme au droit commercial, à condition d’en soigner la rédaction (définition du périmètre, modalités de rémunération, absence de lien avec des actes de soins, etc.).
Risques et points de vigilance :
Le risque principal est la confusion entre l’activité de soins et l’activité d’apporteur d’affaires.
Il faut s’assurer que les recommandations de programme ne se fassent jamais à l’occasion ou dans le prolongement d’une consultation de soin, ni ne s’accompagnent d’un quelconque conseil personnalisé de santé.
Communication transparente : Il faudra veiller à la transparence sur la qualité de l’activité et l’indépendance des praticiens dans leurs deux sphères d’activité.
Contrôle des Ordres professionnels : Chaque profession peut avoir ses propres règles et interpréter différemment les notions de “conflit d’intérêts” ou “activités accessoires”, d’où la nécessité d’une convention détaillée, validée le cas échéant par l’Ordre concerné.
Formalisme contractuel : La convention doit clairement identifier qu’il s’agit d’une activité accessoire, hors champ réglementé de la santé, avec mention de l’absence de lien avec l’activité de soins et respect absolu du secret professionnel.
Le modèle de rétrocession de commission dans le cadre décrit (hors soins, hors diagnostic, hors prescription), si la distinction est formelle et étanche avec l’activité de soin, est possible en droit.
La convention d’apport d’affaires doit être séparée des contrats ou conventions d’exercice ou de collaboration liés à l’activité soignante ; elle doit préciser que l’activité exercée ne tombe pas sous la réglementation du Code de la santé publique applicable aux soins.
Il convient de faire valider le projet de convention par un avocat spécialisé et idéalement de solliciter un avis ou une position formelle du Conseil de l’Ordre professionnel compétent pour sécuriser la démarche et anticiper tout risque disciplinaire.
En conclusion, votre projet semble juridiquement possible sous strictes réserves : la séparation nette des activités, le cadre contractuel adapté et la transparence de la communication sont indispensables. L’avis de l'Ordre des masseurs kinésithérapeutes est recommandé pour sécuriser durablement l’opération.
Je vous remercie pour votre retour.
Si vous avez le contact d'un avocat spécialisé pouvant m'accompagner sur cette thématique, je suis preneur.