Droit au bail / transfert à descendant d'un bail portant sur un logement locatif HLM

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Madame, Monsieur,

Je me permets de vous écrire car j’aurais besoin d’un conseil juridique relatif au droit au bail.

Contexte :

Ma mère est locataire d’un appartement 3 pièces auprès d’un office HLM depuis mars 2000.

Depuis cette date, ma sœur habite avec ma mère.

Le bail est au nom de ma mère uniquement (ma sœur n’est pas mentionnée dessus).

En août 2019, ma mère décède et nous adressons à la société HLM un courrier recommandé les informant du décès de notre mère dans lequel nous sollicitons le transfert du bail au nom de ma sœur au titre de l’article 14 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989.

L’office HLM répond à ma sœur que sa composition familiale (à savoir célibataire) et ses ressources (relativement faibles car elle avait mis son activité de coiffeuse à domicile en sommeil pour s’occuper de notre mère pendant les longs mois de sa maladie) ne répondent pas aux critères d’attribution du dit-logement mais envisage de lui proposer un autre logement adapté à sa composition familiale.

Ma sœur ne souhaitant absolument pas quitter le logement qu’elle occupait avec ma mère, nous adressons un nouveau courrier recommandé à l’office HLM en leur indiquant que l’article 40 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 stipule que les conditions de ressources et d’adaptation du logement à la taille du ménage ne sont pas requises envers les personnes présentant un handicap au sens de l’article L.114 du code de l’action sociale et des familles.

Il convient de noter que ma sœur a subit un AVC en 2014 et souffre de troubles cognitifs.

Nous fournissons un certificat médical du neurologue qui la suit, qui atteste qu’elle souffre d’un handicap cognitif persistant (troubles de la mémoire, désorientation spatiale et troubles attentionnels) au sens de l’article L.114 du code de l’action sociale et des familles.

Il précise également que le changement de son logement actuel est absolument contre-indiqué car il pourrait déséquilibrer son équilibre fragile dans le contexte de son handicap cognitif.

En réponse à notre courrier, l’office HLM répond que les conditions de transfert du bail à une personne en situation de handicap sont effectivement différentes mais précise que le demandeur du droit de suite doit justifier de son état par une carte d’invalidité indiquant un taux d’incapacité égal ou supérieur à 80 %.

L’office HLM demande également à ce que ma sœur lui fournisse le formulaire CERFA « Demande de logement locatif social » et précise qu’il souhaite rencontrer ma sœur afin de définir les critères de son relogement.

Je réponds, à mon tour, à l’office HLM en lui rappelant que l’article L114 du code de l’action sociale et des familles ne mentionne aucun taux d’incapacité et lui demande de bien vouloir m’indiquer sur quel texte de loi il s’appuie pour me réclamer une carte d’invalidité ; document qui devra bien entendu être opposable à l’article susmentionné. Je profite de ce courrier pour fournir un second certificat médical d’un médecin Généraliste, ancien praticien attaché au service des Urgences des Deux Vallées à Juvisy sur Orge, attestant avoir pris en charge ma sœur, avoir assuré son suivi et certifiant qu’elle présente toujours une altération substantielle et durable des fonctions cognitives, physiques, et psychiques au sens de l’article L114 du code de l’action sociale et des familles.

A mon sens, ni l’article 40 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, ni l’article L114 du code de l’action sociale et des familles ne stipulent de pourcentage d’incapacité mais avant de poursuivre dans notre démarche en ayant éventuellement recours à un avocat, j’aimerais m’assurer que nous sommes effectivement dans notre droit…

Autre question : sachant que ma sœur occupe déjà un logement (mais n’est pas titulaire du bail) doit-elle effectivement fournir le document de demande de logement locatif social ? Ne serait-ce pas une façon de lui faire reconnaître qu’elle est effectivement demandeuse d’un autre logement ?

Espérant que vous serez en mesure de m’aider / me conseiller dans cette démarche qui risque de prendre une tournure juridique et non amiable, je me tiens à votre disposition pour tout complément d’information.

Bien cordialement,

Vxxxxxxx

xxxxxxxxxxxx Dernière modification : 20/01/2020 - par Tisuisse Administrateur

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Bonjour,


Ma sœur ne souhaitant absolument pas quitter le logement qu’elle occupait avec ma mère ...

Le problème est qu’il y a certainement des personnes qui souhaitent vivement pouvoir se loger décemment à un coût compatible avec leurs resssources financières et qui attendent avec impatience la libération d’un trois pièces.


Il précise également que le changement de son logement actuel est absolument contre-indiqué car il pourrait déséquilibrer son équilibre fragile dans le contexte de son handicap cognitif.

Le problème est que les personnes qui attendent la libération de votre logement vivent probablement dans des conditions elles aussi tout à fait contre-indiquées.


Je réponds, à mon tour, à l’office HLM en lui rappelant que l’article L114 du code de l’action sociale et des familles ne mentionne aucun taux d’incapacité et lui demande de bien vouloir m’indiquer sur quel texte de loi il s’appuie pour me réclamer une carte d’invalidité;
document qui devra bien entendu être opposable à l’article susmentionné.

Et quel texte de loi rend opposable à l’organisme HLM l’attestation du neurologue que votre sœur a produite ?

A défaut d’une preuve d’invalidité acceptée par l’organisme HLM, votre sœur n’a d’autre recours que l’action en justice. Il appartiendra au juge de déterminer, sur le rapport d’un médecin expert près le tribunal, si, réellement, la fragilité de votre sœur dans le contexte de son handicap cognitif interdit son transfert dans un autre logement. On peut d’ailleurs se demander pourquoi, si l’équilibre de votre sœur est si fragile, cela ne lui donne pas droit à une carte d’invalidité.

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amajuris Modérateur

bonjour,

une décision de la cour d'Appel de Versailles en date du 7 mars 2017 (15-07316) précise la notion « personne présentant un handicap » au sens des articles 14 et 40 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989.

Pour la cour d’appel de Versailles, si la situation de handicap permet de déroger aux conditions imposées par la règlementation HLM pour bénéficier d’un transfert de bail, sa définition s’entend toutefois de manière stricte et correspond uniquement à celle donnée par l’article L. 114 du CASF (selon lequel « constitue un handicap toute limitation d’activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d’une altération substantielle, durable ou définitive d’une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d’un polyhandicap ou d’un trouble de santé invalidant »).

le certificat médical établit par le neurologue mentionne-t-il bien que le handicap de votre soeur correspond strictement au handicap mentionné par l'article 114 du CASF, si oui l'office HLM ne peut pas refuser le transfert de bail.

salutations

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Bonsoir,

Merci pour vos réponses.

Voici l'attestation fournie par le neurologue de ma soeur :

"Je soussigné, Dr XXXX, Praticien Hospitalier dans le service de neurologie du Centre Hospitalier XXXX, certifie que l'état de santé de Madame XXX XXXXX, née le XX/XX/XXXX, est suivie pour un AVC ischémique (Accident Vasculaire Cérébral) survenue en novembre 2014, responsable d'un handicap cognitif persistant (troubles de la mémoire, désorientation spatiale et troubles attentionnels) au sens de l'article L.114 de code de l'action sociale et des familles.

En outre, Madame XX a perdu sa mère récemment, ce qui contribue à la majoration de son handicap cognitif.

Le changement de son logement actuel est absolument contre-indiqué, car cela pourrait déséquilibrer un équilibre fragile dans le contexte de son handicap cognitif.

Certificat établie à XXX, le XX/XX/XXXX, à la demande de l'intéressée, pour servir et valoir ce que de droit. "

Voici maintenant la deuxième attestation fournie par le Généraliste :

"Je soussigné, Dr XX XXXX, ancien praticien attaché au Service des Urgences du Centre Hospitalier des XXXXXX à XXXXX, certifie avoir pris en charge Madame XXX XXXX, née le XX/XX/XXXX, pour un AVC ischémique survenu en novembre 2014.

Je l'ai adressée dans le service de neurologie du Centre Hospitalier XXXXX qui a confirmé le diagnostic et instauré le traitement adapté.

Je l'ai revue régulièrement en consultation par la suite et j'ai pu constater la persistance de troubles cognitifs handicapants (troubles de l'attention, de la mémoire et désorientation spatiale).

Le décès de sa maman à l'issue d'une "longue maladie" pour laquelle elle a assuré une prise en charge assidue au domicile, a accentué son handicap cognitif, majoré par un épisode dépressif réactionnel.

Madame XX XXXXX présente toujours une altération substantielle et durables des fonctions cognitives, physique et psychiques au sens de l'article L.114 du code de l'action sociale et des familles, et par conséquent, un équilibre fragile que tout changement dans son environnement, rassurant pour elle, pourrait rompre, au risque de complications majeures.

Le changement de domicile me semble donc absolument contre-indiqué.

Certificat établi à la demande de l'intéressée, pour servir et valoir ce que de droit."

L'office HLM semble faire référence à leur règlement intérieur quand il demande la carte d'invalidité.

Selon moi, un règlement intérieur ne peut être opposable à un texte de loi (texte de loi qui de surcroît, ne semble pas mentionner de pourcentage d'invalidité...).

Pour répondre au commentaire d'un des membres, ma soeur ne pourra jamais disposer d'une carte d'invalidité avec un taux égal ou supérieur à 80%. Elle a bien des séquelles de son AVC mais ils ne sont pas de nature à la rendre invalide à 80 %.

Pour l'instant, le dossier est traité par l'agence locale HLM. Dois-je leur demander de présenter le dossier à leur commission d'attribution des logements ou leur dire que je présente le dossier à un médiateur (avant d'avoir recours à un avocat) ?

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un règlement intérieur ne peut être opposable à un texte de loi

Cette phrase n'a pas de sens. Ce qui est opposé est un motif, un argument, une raison etc. On l'oppose à la personne avec laquelle on entretient un différend. On le fait oralement ou par écrit. Un texte de loi n'entend pas, ne sait pas lire et n'agit pas. "Tel motif est opposable à telle personne" signifie : "Tel motif s'impose à telle personne."

Une situation de handicap est affaire d'appréciation. L'appréciation du médecin traitant d'un locataire ne s'impose pas à l'office HLM. Une tentative de médiation ou de conciliation est envisageable.