Irrecevabilité pour oubli d'un accusé réception

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Bonjour,

J'ai déposé début 2008 une requête pour harcèlement moral au Tribunal administratif. Elle faisait suite à un courrier recommandé avec AR adressé à mon employeur public (Rectorat) avec rappel des faits et estimation du préjudice financier.

Dans le mémoire introductif mon avocate ne mentionne pas explicitement mon courrier mais le joint en annexe sans l'accusé réception.

Le Rectorat a ensuite prétendu dans sa réponse ne pas avoir reçu le courrier.
Mon avocate a répondu dans le mémoire en réplique qu'elle l'avait déjà joint mais n'a pas à nouveau joint l'AR. Il est vrai qu'il y avait beaucoup de points à répondre et cela a dû lui échapper.

Le Tribunal vient de rejeter ma requête pour irrecevabilité à cause de l'accusé réception qui n'a pas été joint. Il est mentionné que je peux faire appel à la cour administrative.

Ma question : est-il possible dans cet appel d'ajouter cet AR que nous avons bien et qu'il nous est facile de joindre ?

Certains juristes me disent qu'on peut ajouter en appel une pièce oubliée, d'autres me disent qu'on ne peut pas et qu'il faut tout recommencer parce qu'on ne peut pas apporter de nouvelles pièces déjà réclamées !

Que faire ?

Merci d'avance pour vos conseils.

Lisaluna

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Bonjour,
Le CJA ne dispose à ma connaissance d'aucune disposition interdisant de joindre en appel un document non produit en première instance. De plus il est possible en appel d'invoquer un moyen de même cause juridique que ceux exposés en première instance donc a fortiori, vous devriez pouvoir développer un moyen soulevé en première instance.
Nul besoin de recommencer la procédure normalement. Toutefois attention, là pour une bourde comme celle-ci (que tout étudiant de 2ème de droit aurait su éviter) changé d'avocat. De plus là c'est obligatoire d'en prendre un, donc bon courage.
Si toutefois la procédure vous parez trop lourde financièrement ou que l'appel vous refuse la pièce jointe : Recommencez cela seule et basez vous sur vos conclusions en demandant conseil, car le ministère d'avocat n'est pas obligatoire en première instance.
Bonne chance.

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Merci pour cette réponse. Je suis d'accord avec vous, la bourde est énorme et c'est d'autant plus rageant que je dispose de la lettre avec son accusé réception.

Pour la cour administrative d'appel, le TA mentionne que je suis obligée de recourir à un avocat. A l'évidence, je vais changer d'avocat même s'il ne me reste plus beaucoup de temps.

Vous me dites que je peux recommencer la procédure comme en 1ère instance si l'appel rejette ma contestation. Comment est-ce possible ? Pouvez-vous m'expliquer ?

Merci encore.

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Déclarer irrecevable une procédure pour un petit détail comme celui-là !
Il est vrai que c'est le courrier de départ adressé à l'employeur en AR. Il était donc évident que la plaignante l'ait envoyé.
Pourquoi ne pas essayer de contacter le tribunal pour leur communiquer la pièce manquante (l'AR du courrier de départ) en faisant état de votre bonne foi ?
Est-il nécessaire de faire appel avec le délai que cela suppose ?
En tout cas, je suis d'accord avec Stryffe, quelle bourde !!
Cette avocate mérite de rembourser les honoraires qu'elle a reçus !

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Non malheureusement, appeler le T.A ne changera rien. Il fallait déposer cette pièce avant la clôture de l'instruction. Malgré toute la bonne foi des magistrats, la loi c'est la loi (dura lex, sed lex).D'autant que bien souvent, il arrive que même en sachant qui est celui qui a tord, les juges doivent rendre une décision injuste mais légale, c'est leur rôle de dire le droit.

Cependant, pour répondre à Lisaluna, elle peut recommencer la procédure.
Ce que vôtre avocat vous à fait faire c'est un REP (recours en excès de pouvoir). Il s'agit d'une procédure visant à faire un procès à un acte et uniquement ça. C'est à dire que vous en demandiez l'annulation. Là vous me direz oui mais qu'elle acte ?
Regardez bien la lettre en question : il s'agit d'une demande d'indemnisation pour harcèlement moral. Or ce courrier, en n'ayant eu aucune réponse pendant deux mois, à caractériser le refus de l'administration de vous donnez droit. Là vôtre "avocat" a attaqué ce refus en démontrant normalement que vous aviez bien subit ce préjudice de la part de vôtre employeur*.
Le REP est une procédure sans obligation de ministère d'avocat ce qui vous auriez permis de le faire vous-même, ou de mandater quelqu'un d'habilité pour le faire (ça peut être un ami qui s'y connait, un syndicat, une association, moi ...). A moins de faire appel, il est impossible de refaire un procès sur la même chose (ce qui est jugé à l'autorité de la chose jugée). Or le REP c'est un procès à un acte donc si vous ré-envoyez une autre demande d’indemnisation, vous pourrez refaire un REP contre le nouveau refus.
C'est la procédure la moins coûteuse. Après, il y a le recours en plein contentieux. Là on demande directement au juge ce que vous aviez demandé dans la lettre. Attention là c'est ministère d'avocat obligatoire, mais au moins vous êtes sûre de pouvoir mieux prouver vôtre harcèlement.
*C'est pourquoi les mémoires de vôtre précédent avocat sur ce sujet peuvent vous êtres utiles mais il faut qu'ils soient complets. Ce dont vous pouvez douter avec la bourde évoquée. D'autant que là attention ! Vous avez été déboutée pour irrecevabilité de la requête (pas de preuve de l'acte attaqué : si pas prouver que lettre reçue = pas prouver qu'administration refuse), donc vous n'êtes pas sûre de l'avoir eu pour le fond car les juges ne sont pas allés plus loin normalement.
Tous ça pour vous dire de faire très attention et aussi des techniques que vos avocats ne vous révélerons pas (à vous profane, donc pigeon).
Bon courage pour la suite.

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Mais dites moi, avec une bourde pareille, l'avocate qui a touché les honoraires et a entraîné sa cliente dans le rejet du tribunal devrait rembourser !
Comment faire quand un avocat fait une erreur de débutant pour se faire rembourser ?

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Merci encore Stryffe pour vos précisions. Quant à Nordic, vous posez les mêmes questions que je me pose.

J'ai bien compris vos explications sur un nouveau REP. Effectivement la lettre que j'ai envoyée au rectorat avec AR correspond à ma demande de recours gracieux. Et les fameux deux mois se sont écoulés etc. C'est d'ailleurs un des arguments de mon avocate de dire, on ne peut du coup pas en être à ce stade de la procédure, si la demande d'indemnisation n'avait pas été envoyée. C'est pour elle encore une preuve qu'il y a un AR. Ce que je ne pense pas personnellement. Le plus simple aurait été de fournir l'AR quand le rectorat l'a réclamé.

Maintenant, si je suis votre raisonnement d'un nouveau REP. Ca veut dire de recommencer depuis le début (quitte à mentionner un nouveau préjudice financier qui a augmenté d'ailleurs) mais est-ce possible parallèlement de contester la décision en appel du TA pour irrrecevabilité suite à cet AR non fourni par mon avocate ?

Je ne sais pas si je suis claire mais ce n'est pas simple dans cet imbroglio.

Autre question : je ne comprends pas votre partie sur le recours en plein contentieux. De quel tribunal s'agit-il ou quelle procédure ? Désolée, je perds un peu le fil, ça doit être le stress car vos explications me sont très utiles.

D'avance merci.

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Bon je reprends et si je peux je réponds à nordic75 qui s'inquiète en découvrant les failles du système juridictionnel français.

Pour lisaluna :
D'une part on le REP et de l'autre le recours en plein contentieux. Ces deux recours se forment devant le T.A en amont sauf exception lorsqu'on attaque par exemple un acte tel qu'un arrêté ministériel (là c’est directement de la Conseil d’Etat).
Là attention ces deux procédures répondent aux mêmes critères d'attributions de la juridiction (lieu, défendeur, mais surtout là est-ce qu'on travail sur du droit administratif ?). Une fois cela décortiqué on avance dans les différentes procédures comme le référé qui a pour objectif de suspendre la situation en cas de doutes sérieux d'illégalité de l'acte attaqué et se demande toujours si un REP est formé. Exemple : un arrêté de réquisition des ouvriers du pétrole par l'Etat alors que ceux-ci sont en grève.
Ce sont des mesures additionnelles bien souvent pour sauvegarder une situation lors de l’instruction, etc....
Toutes ces procédures devant le T.A notamment sont régies par le CJA (code de justice administrative). Il existe aussi des particularités au sein du REP comme du plein contentieux notamment au niveau du ministère d'avocat. En temps normal c'est obligatoire pour le plein contentieux et optionnel pour le REP.
Sauf qu'en droit français tout à une exception (même l'exception d'ailleurs).
Ainsi en appel d'un REP (et seulement en appel pas en cassation) le ministère est obligatoire (c'est couteux et ça désengorge les CAA) et en plein contentieux, lorsqu'on attaque l'administration en réparation de "dommages de travaux public" le ministère redevient optionnel (autant vous dire que quand on ne porte pas la toge défendre quelqu'un dans ces conditions c'est formateur).

Le plein contentieux c'est quoi : je ne désir pas l'annulation d'un acte (dans votre cas un refus, donc si l'administration n'a plus de droit de refuser, elle doit accepter ce que vous lui demander) mais je demande directement au juge d'ordonner ce que je veux de l'administration. Ex : dommages et intérêts, mesures de sureté, exécution du contrat, démolition d'un bâtiment ... du moment que je suis dans mon droit, c'est comme devant le TGI mais selon les règles du droit administratif.

Je vous aurez bien fait partager mes cours de fac, mais les universitaires tiennent à leurs droits d'auteurs et encore plus les juristes car quel meilleur connaisseur du droit ? (le législateur est une très mauvaise réponse)

Concernant le préjudice ATTENTION ! Là vous demandez via une lettre une indemnité, si vous faite la lettre c'est que vous allez en REP, donc c'est ou le refus est légale, ou il est illégale. Le juge ne va pas modérer comme ça la somme vue que c'est un REP donc pas trop gourmande non plus pour l'indemnité, d'accord ?

En cas de soucis association.julia@yahoo.fr

Pour nordic75:

Je pourrais résumer ça en disant que c'est comme pour les médecins. Ils fixent le numerus clausus (via le conseil de l'Ordre) pour protéger leurs clientèles mais on manque toujours de médecins en France.
En droit c'est presque ça, les politiques souvent font du droit (Sarkozy, Copé, Royale, Lepen, etc.…), ils font ensuite la loi. Or la loi veut que pour toute dénonciation contentieuse d'un contrat il faut un avocat pour se faire représenter devant les juges. Demandez à un avocat de vous représenter pour dénoncer un contrat de mandat d'avocat et vous comprendrez.
Ces personnes font du droit pour d'abord gagner de l'argent, personne ne donnera le bâton pour se faire taper dessus (d’ailleurs deviner comment on nomme un « gendarme des avocats » ? => Un bâtonnier).

Très consciens de l'attention qui est portée à ce que j'explique et plein d'espoire pour ceux qui me lise.

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Merci Stryffe pour vos compléments de réponse. Les choses s'éclaircissent.

Recommencer la procédure pour faire part en bonne et due forme du recours indemnitaire préalable à l'administration puis au tribunal du même montant du préjudice etc., cela signifie non seulement que c'est possible mais surtout qu'il vaut mieux faire ainsi car je risque d'être à nouveau déboutée pour une autre irrecevabilité qui porterait sur l'augmentation du préjudice ?

Je m'explique : l'AR que je dois fournir porte sur la lettre de recours indemnitaire. Quand je l'ai envoyée à mon employeur le préjudice était de 50 000 Euros d'après mon avocate.

Quand elle envoie par la suite son mémoire 1, elle augmente le préjudice sans me dire d'envoyer de nouveau un recours indemnitaire préalable à mon employeur.

Il semblerait donc que l'irrecevabilité de ma requête porte et sur l'AR (ça, c'est sûr) mais également sur le fait qu'elle ait augmenté le préjudice sans recours indemnitaire préalable correspondant au même montant indiqué dans son mémoire 1.

Je crains donc qu'en appel, je sois de nouveau déboutée car mon employeur l'a évoqué aussi dans ses dernières conclusions et le tribunal le cite dans son ordonnance même s'il est davantage mis l'accent sur l'AR non transmis.

En conclusion : quelle est la solution la plus sûre ? Appel pour l'AR mais aussi REP + recours en plein contentieux pour régler aussi ce problème de préjudice qui risque d'être soulevé aussi ?

D'avance merci.

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Bonjour,
Très bonnes questions, je pourrais y répondre avec plus de précision si vous me donner la référence de l'ordonnance du TA qui a statué en première instance (ainsi que si vous me dîtes lequel). Je vais essayer de la consulter sur les bases légales pour comprendre les raisons du rejet de vôtre requête.
Le mieux serait que vous me scaniez directement la décision (bien sur une copie sur laquelle vous avez noircie les informations personnelles) à l'adresse que je vous ai communiqué.
Pour la dernière question, le REP et le plein contentieux ne se cumulent pas c'est ou l'un ou l'autre (c'est juste ce que vous attaquez un acte ou une personne, mais les deux c'est la personne qui prime donc plein contentieux vue qu'il y a déjà tout).
Merci.

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Merci Stryffe pour vos conseils.

Je viens d'adresser un mail à votre association avec copie de l'ordonnance.

D'avance merci pour votre aide et à bientôt,

Lisaluna